Lorsque les psychologues étudient les jeux vidéo, ils cherchent dans un premier temps à établir des faits puis à les expliquer. Les faits consistent en des mesures simples qui mettent en rapport des éléments liés aux jeux vidéo (temps de jeu, genre etc) avec des comportements (agressivité, interactions sociales etc.)ou des traits de personnalité. Les théories sont très différentes des faits car il n’est pas possible de les observer. Ce sont des récits hypothétiques et explicatifs qui racontent comment les faits observés peuvent s’organiser. Trois théories sont généralement utilisées pour expliquer les effets des jeux vidéo : la théorie sociale cognitive (Bandura 1997, 2001), la théorie du transfert de l’excitation (Tannenbaum et Zillman, 1975; Zillman, 1988) et la théorie de l’amorçage (Berkowitz, 1984), Berkowitz et Rogers, 1986). Ces théories ont été assemblées en un modèle par Anderson dans un modèle appelé le Modèle Général de l’Agression  (Anderson et Dill, 2000; Anderson et Bushman, 2001)

La théorie sociale cognitive fait l’hypothèse que la violence présentée comme justifiée dans les jeux vidéo est internalisée par les joueurs. Elle peut ensuite plus facilement être transférée dans des situation non ludiques parce que les joueurs ont tendance à s’identifier aux personnages .

Le modèle du transfert d’excitation explique différemment les effets des jeux vidéos. Selon ce modèle, l’excitation des parties de jeux vidéo intensifie l’état émotionnel du joueur et ont tendance à perdurer après la partie. Même si ce modèle ne prédit pas nécessairement que le joueur aura des conduites agressives après avoir joué à un jeu vidéo violent, l’intensité de l’état émotionnel peut fonctionner comme un facilitateur

Le troisième modèle théorique explique les effets des jeux vidéo par l’amorçage. Les jeux vidéo violents facilitent l’accès à des pensées associées à la violence et à la cognition qui sont après coup transférées dans des situations de la vie quotidienne.

 

Chaque théorie est aussi une clé d’intervention éducative. La théorie sociale cognitive indique qu’il faut éviter que les personnages des jeux vidéo deviennent des figures d’identification des enfants. Nous avons tous tendance à nous appuyer sur des images pour renforcer des attitudes psychologiques. Le processus devient problématique lorsque les modèles de la culture populaire deviennent la principale référence de l’enfant.  Il est donc important que les parents prennent le temps de discuter avec leurs enfants des stratégies utilisées par leurs héros dans les jeux vidéo. La violence était-elle nécessaire ? Justifiée ? L’important est d’aider l’enfant à construire petit à petit un bon jugement moral qui lui permettra de se décentrer de ce qu’il vit avec ses jeux vidéo.

Le modèle du transfert d’excitation dit ce que les parents constatent banalement : après une partie de jeu vidéo, les enfants sont excités. Ce que le modèle ne dit pas, c’est que les jeux vidéo mettent les joueurs dans un état de tension car ils doivent rester pratiquement immobiles tout en vivant des émotions fortes ou intenses. Lorsque la tension du jeu s’arrête, il faut bien qu’elle trouve un excutoire. La préparation à ce moment de débordement, une bonne dose de patience et de l’empathie sont ici les meilleurs ingrédients

Enfin, les effets prédits par le modèle de l’amorçage peuvent facilement être au service de l’agenda éducatif. Les média amorcent des pensées et des émotions mais ces pensées et ces émotions peuvent aussi bien être positives que négatives. Ainsi, les jeux vidéo violents vont amorcer des pensées, des émotions et des comportements violents et les jeux vidéo prosociaux vont alimenter des pensées, des émotions et des comportements prosociaux. Il peut donc être utile de donner aux enfants, a coté des jeux vidéo violents, des jeux vidéo qui favorisent les conduites prosociales. Les jeux vidéo dans lesquels le joueur prend soin de quelque chose (un humain comme dans Les Sims, des animaux comme dans Lemmings, des batiments comme dans  Farmville) peuvent facilement jouer ce role

 

Quelque soit la clé éducative, l’important est d’éviter de faire du jeu vidéo une pratique solitaire en l’intégrant dans les discussions familailes.

 

 

Enfin, le modèle de l’amorçage