Les jeux vidéo souffrent tantôt d’une mauvaise tantôt d’une bonne réputation : ils sont à l’origine d’addictions ou nous aident à devenir des surdoués. Dans les deux cas, les assertions ne sont pas prouvées. Il s’agit en fait des deux faces d’une idéalisation qui peut être négative ou positive.

 

Une équipe de psychologues français avait déjà montré que le jeux Le Programme d’entrainement cérébral, Cerebrale académie et Gym-cerveau n’apportaient aucune amélioration en termes de QI. Les français avaient travaillé sur 49 élèves de CM2. L’étude anglaise porte sur un échantillon beaucoup plus vaste  puisque qu’elle a réuni pas moins de 11400 adultes. Publiée dans Nature, l’étude a fait le bonheur de la psychosphère anglophone.

 

L’étude

L’étude a été conduite par Adrian M. Owen, du Medical Research Council (MRC) Cognition and Brain Sciences Unit de Cambridge. Les participants ont été placés en trois groupes après un test en ligne qui a permis d’évaluer leurs capacités mentales. Dans un groupe, les sujets ont utilisé des jeux d’entrainement qui avaient pour but d’améliorer la planification et la capacité de résolution de problèmes. Dans le second groupe, les sujets utilisaient des jeux visant à accroître leur mémoire court terme, l’attention et les capacités mathématiques. Enfin, le troisième devait répondre à des questions de connaissance générale en surfant sur Internet

Les participants devaient s’entrainer 10 minutes par jours, trois fois par semaines et pendant six semaines. Beaucoup ont été beaucoup plus zélés.

 

Les résultats

Les résultats sont simples : les jeux vidéo ne rendent pas plus intelligents. Certes, Counter Strike et Gran Thief Auto n’avaient pas cette réputation. Mais on parle ici de jeux dont la fonction est “l’entrainement cérébral”. Il y a bien un effet d’entrainement : les personnes sont meilleurs dans les taches du jeu, mais il n’y a aucun effet de transfert des compétences acquises dans le jeu à au fonctionnement cognitif général

Même pour les personnes qui se sont entrainées plus que la moyenne, il n’y a pas de transfert à une amélioration du fonctionnement cognitif (…) Certains domaines comme être plus rapides en mathématiques peuvent être utiles en soi. Mais si vous utilisez ces jeux pour voir une amélioration globale du fonctionnement psychique, Jessica A. Grahn

En somme, s’entrainer à un jeu vidéo rend plus performant dans le jeu vidéo. Point. Mais ne gâchons pas notre plaisir. Si le jeu vidéo ne rend pas plus intelligent, il ne rend pas non plus plus idiot.

 

Le marché

L’entrainement cérébral est  en fait purement et simplement d’un marché sur lequel Nintendo a eu l’intelligence de se positionner. Et sans être un génie du marketing, on peut imaginer que le vieillissement de la population et une publicité s’adossant sur des figures d’autorité Le génie de Nintendo a été de vendre des console NDS àdes seniors. Les publicités des jeux “d’entrainement cérébral” sont toujours présentés avec une caution scientifique : le fondateur du jeu, le Dr. Ryuta Kawashima  est présenté comme un “éminent scientifique” . Par ailleurs, le terme même d’entrainement cérébral laisse entendre que le cerveau est comme un muscle et que le bon entrainement permet d’améliorer ses performances, ou au moins de le maintenir dans un état de fonctionnement .

Contacté par WebMD.com après cette étude, Nintendo  une position des plus prudentes :  “Nintendo ne prétend pas qu’il est scientifiquement prouvé que  Brain Age ou Brain Age 2 améliorent le fonctionnement cognitif

Pourtant, on lit sur la page de Brain Age : Tout le monde sait que vous pouvez prévenir contre la perte des muscles en faisant de l’exercice, et utiliser ces activités pour améliorer votre corps avec le temps. On pourrait dire la même chose à propos de votre cerveau. Brain Age est conçu avec l’idée que l’exercice cognitif peut améliorer le flot de sang à votre cerveau.

Regarder [W:Desesperate Housewifes] améliore certainement tout autant l’afflux de sang au cerveau, et pourtant la série TV ne prétend pas améliorer le fonctionnement cognitif.

 

 

Il y a tout un marché que Nintendo est en train s’ouvrir : celui de la maladie d’Alzheimer, des troubles de l’attention… et celui du serious gaming. Le jeu vidéo serait le nouvel Eldorado de la santé et de l’éducation. Têtes blondes, grises, casquées ou souffrantes, toutes et tous trouveraient dans le jeu vidéo de nouveaux moyens d’apprentissage, d’entrainement ou de soin. On comprend que le projet soit séduisant : il fait l’économie de ce que tout apprentissage ou tout soin nécessite et promet magiquement d ‘ “améliorer son fonctionnement cérébral”. Or, le travail de médiation passe toujours par un autre humain. On ne guérit pas seul. On n’apprend pas seul. On guérit ou on apprend dans le cadre d’une relation médiée par un être humain.

 

 

Putting Brain Training to the Test