Une recherche menée par Killian MULLAN et publiée dans la revue Child Indicators Research montre que le numérique est intimement mélangé aux autres activités de la vie quotidienne.  “Technology and Children’s Screen-Based Activities in the UK: The Story of the Millennium So Far” donne un éclairage nouveau et important sur les activités numériques des enfants anglais âgés de 8 à 18 ans

Cette étude est intéressante parce qu’elle permet de comprendre dans le détail ce que font les enfants avec les objets numériques. Depuis les années 2000, la recherche s’est surtout intéressée aux aspects quantitatifs du phénomène. On a donc compté le temps que les enfants passent devant un écran pour constater qu’il augmentait d’année en année.  Cela a contribué à construire un climat anxiogène autour des écrans. Si les enfants passent autant de temps avec un écran, ou trouveront-ils le temps pour les activités qui leur assurent un bon développement ?

Il est important de noter que la théorie de référence implicite de cette question est celle du remplacement. Selon cette théorie, le temps passé devant un écran est un temps pris sur une autre activité. Cela peut donc être problématique si cette autre activité est importante (apprendre ses devoirs, se faire des amis). L’étude Killian MULLAN dresse un paysage plus complexe. Les activités écraniques se font parallèlement à d’autres activités. Un enfant peut par exemple regarder la télévision et surfer sur Instagram en même temps. Bien sur, il peut aussi faire ses devoirs et suivre des conversations sur Whatsapp.

Selon Killian MULLAN, la moitié du temps passé avec un écran est passé à faire en même temps autre chose.  En d’autres termes, cette étude montre que pour les enfants, la question est moins ceci (non-écran) ou cela (écran) mais comment ceci (non-écran) est rendu possible ou facilité par cela (écran). Cette distribution de l’attention sur plusieurs activités apporte de nouvelles questions. En effet, faire plusieurs choses à la fois ajoute du fun a une activité rébarbative, mais cela se fait au prix d’une dégradation des performance. Les enfants doivent donc apprendre quand le multitâche est possible et quand il est nécessaire de rester focalisé sur une activité.

Killiam MULLAN a mesuré un fait sociologique total : la conversion numérique de notre société. Cette conversion affecte aussi les enfants qui passent par le numérique pour travailler, jouer ou simplement discuter avec des amis. Cela implique le développement de nouvelles compétences comme la capacité à ne pas répondre aux sollicitations des applications pour garder une concentration de bonne qualité mais aussi la capacité de distribuer son attention sur plusieurs écrans lorsque la charge de travail demandée n’est pas importante. En d’autres termes, s’il y a quelque chose à faire avec les enfants, ce n’est pas les éloigner des écrans mais bien plutôt leur apprendre à s’en servir. En somme, les enfants ont besoin d’une littératie numérique.

 

SOURCE

Killian Mullan. Technology and Children’s Screen-Based Activities in the UK: The Story of the Millennium So Far, Child Indicators Research (2017). DOI: 10.1007/s12187-017-9509-0