Le couloir était devenu un enfer. Les AK-47 crépitaient de toute part et personne ne se hasardait à faire un seul mouvement. Ce n’était plus qu’une question de temps : les autres allaient faire le tour et nous éliminer un à un. Faits comme des rats ! Et puis, ce type est arrivé. Alors que tout le monde était le nez dans la poussière, il courait dans ce couloir tenu sous le feu des AK-47. Au bout de son bras, un méchant Desert Eagle aboyait rageusement. BLAM ! BLAM ! BLAM ! BLAM ! Des coups lents et graves. A chaque coup, un AK-47 s’arrêtait. Les AK-47 qui régnaient sur le couloir quelque secondes auparavant n’étaient plus que des roquets inoffensif. réduits uns à un au silence. La lecture du chatterbot était hallucinante
Kreniak killed Zuv
Kreniak killed ForgiveMe
Kreniak killed Erstoo
Kreniak killed BnF
OMFG ! HEADSHOT S! Quelqu’un avait crié que ce que tout le monde avait en tête. On en voulait encore plus. Kreniak était le dieu du round et nous étions ses adeptes dévoués.
Les jeux les plus vendus et les plus appréciés sont dans leur grande majorité des jeux mettant en scène des guerriers et des champs de bataille. Ce fait suscite régulièrement des interrogations et des mouvements de rejet vis-à-vis des jeux vidéo et des joueurs car un raccourci est fait entre la violence réelle et la violence que l’on peut trouver dans les jeux vidéo
Alors qu’ils sont le média le plus vendu, les jeux vidéo et les joueurs sont encore objets d’un malentendu. Les trois milliards d’heures passées à jouer chaque semaine par les gamers sont comprises au mieux comme une perte de temps, au pire comme le signe d’une conduite pathologique. Beaucoup font le raccourci jeux vidéo violent – joueurs violents. Les jeux vidéo violents seraient alors une porte d’entrée dans la violence et les FPS des tickets pour Colombine ou Utoya.
Pourtant, une étude menée par Andy Przybylski et Netta Weinstein, montre que ce que les joueurs de jeux vidéo affectionnent dans les jeux vidéo violents, c’est d’abord la possibilité de jouer des rôles, et ensuite la sensation de pouvoir faire des choses.
Pour explorer l’expérience des joueurs, l’étude a consisté en questionnaires et en expériences en laboratoires ; 2670 joueurs ont remplit des questionnaires mesurant l’immersion et la satisfactions des besoins du joueur dans l’expérience de jeu. Les résultats de ces questionnaires ont été complétés par des expériences sur 300 joueurs. Les expérimentateurs ont alors modifié les variables du jeu pour créer des contenus violents ou non violents. Dans une des expériences, les joueurs jouaient avaient le choix entre jouer a Half Life 2 dans sa version commerciale et dans une version modifiée. Dans cette versions, les adversaires contrôlés par l’ordinateurs n’étaient pas tués dans des jets de sang, mais téléportés dans leur base. Une autre étude a utilisé House of the Dead III, un FPS dans lequel le joueur est confronté à une humanité transformée en zombie par un scientifique fou qui voulait sauver son fils. Les expérimentateurs ont modifié le niveau de sang, et les joueur ont joué du gore à l’absence de la moindre goute de sang. Enfin, un quatrième dispositif expérimental a été mis en place pour mieux comprendre les joueurs qui avaient des traits agressifs. L’agressivité des joueurs a été mesurée avant et a après avoir joué a la version gore de House of the Dead III.
Les résultats montrent que l’ajout de contenus violent n’apporte pas peu de plaisir aux joueurs et peut même être critiqué. Ce sont les personnes qui présentent des traits psychologiques liés à l’agression qui trouvent plaisir à la violence dans les jeux sans que cela n’augmente le sentiment d’immersion ou le plaisir à jouer La relations entre les contenus violents et le plaisir à jouer n’est donc pas linéaire. Le plaisir du jeu provient vient d’abord de la satisfaction des besoins d’autonomie et de compétence. En d’autres termes, ce qui est important dans les jeux vidéo, et même dans les jeux vidéo qui mettent en scène des conflits armé, c’est moins la violence et le plaisir d’utiliser une arme que le plaisir maitriser un environnement et ses objets
Maria Frostling-Henningson (2009) montre également que la violence n’est pas le principal intérêt du jeu vidéo. Les joueurs sont bien davantage motivés par son aspect social et l’évasion qu’il procure. C’est cette sociabilité qui explique que les game center sont toujours fréquentés alors même que l’internet domestique est devenu pratiquement la norme. Les joueurs aiment à se retrouver ensemble et à se reconnaitre les uns les autres comme partageant les même intérêts. La dimension sociale apparait également dans les discussions en ligne. Les communications in game permettent de transmettre des apprentissages liés au jeu. Elles sont aussi un aspect purement social. En marge du jeu, les discussions permettent de créer de nouveaux liens et de renforcer ceux qui existaient des soutiens importants. Les communications en ligne permettent également de jouer des rôles, et donc d’exprimer différentes facettes du self. Dans les éléments qui leur donne plaisir à jouer, les joueur mettent en avant le jeu d’équipe et le plaisir de faire partie d’un évènement. A coté de ces aspects sociaux, il est pour Maria Frostling-Henningson une autre grande motivation à joueur au jeu vidéo : c’est l’évasion. Le jeu vidéo est alors utilisé comme un refuse dans lequel le joueur se met à l’abri des anxiétés quotidiennes. L’immersion totale dans un monde, une concentration soutenue et la réussite des actions engagées constitue donne au joueur la sensation de flow (Csikszentmihayl)
il ne faut donc pas se fier aux images dans ce qu’elle ont de plus immédiat ni même dans ce qu’elle ont parfois de plus violents.. Les jeux vidéo sont prisés pour les rencontres avec l’autre qu’il permettent, pour les jeux avec le self qu’ils permettent, et pour le sentiment de prise sur le monde qu’il donnent. La question est moins celle de la violence que celle de la maitrise et du pouvoir.
Si l’évasion procurée par les heures de gaming peut être félicitée, je reste partagé pour les bénéfices – ou au moins l’entretien de la sociabilité : oui, les compétences sociales sont utilisées et affûtées par cette pratique de gaming, mais l’interface (ici le PC) n’est pas la même que dans la vie “réelle”. À cet usage, je vois le bénéfice à court terme pour une personne socialement isolée… mais rien de plus.
Ainsi (pour étayer cette idée) qu’un article d’il y a quelques mois sur Sciences (ou PloS ?) le démontrait, les individus “connectés” expérimentés sont amenés à considérer les fonctionnalités web comme une extension de leur cerveau, et développent leurs facultés mémorielles (voire logiques) quand ils sont sur un/leur PC en disposant d’un accès web.
Une constatation hélas irreproductible une fois ces individus “débranchés”.