http://blog.legardemots.fr/public/icosaedre.jpgL’ amendement 168 proposé par quelques députés s’appuie essentiellement sur le rapport de la MILD concernant les jeux d’argent. On s’étonne tout d’abord de ce que les jeux vidéos soient traités dans un rapport qui s’intéresse aux jeux de hasard et d’argent. Il est en effet facile de comprendre que les dynamiques psychologiques sous-jacentes sont très différentes puisque dans un cas ce qui est recherché, c’est le plaisir du jeu alors que dans l’autre c’est un gain substantiel

Cela ne semble pourtant pas faire problème, et le chapitre intitulé "Le problème spécifique des jeux sur Internet et plus particulièrement des jeux vidéos" commence par le paragraphe suivant

 

Parmi les facteurs recencés par M. Griffiths (2003) liés à l’impact de la technologie sur les pratiques de jeu, l’anonymat, l’acessibilité, la désinhibition ainsi que les dimensions de confort et le caractère bon marché sont mis en avant comme caractéristique situationnelles susceptibles de facoriser les tendances addictives. Chez le joueur pathologique, qui après d’autres manières de jouer, en arrive aux jeux en ligne, Internet peut être considéré comme un dangereux médiateur, alors que pour certains utilisateurs intensifs d’Internet, les pratiques de JHA s’intègrent dans une gamme de possibles addictions : cyber-relation, cyber-sexe, jeux vidéo. Le problème spécifique des jeux sur Internet et plus particulièrement des jeux vidéos

et s’ achève sur

 

il est à priori difficile d’imaginer que la pratique même intensive des jeux vidéos puisse être à l’orgine d’une addiction. Le problème spécifique des jeux sur Internet et plus particulièrement des jeux vidéos

Entre cette conclusion, sans appel, sur l’absence d’une addiction aux jeux vidéos, et l’introduction, 9 pages ou l’on commence d’abord par essayer de monter le lien addiction- jeu vidéo, pour dériver sur des considérations sur le lien violence – jeux vidéo, avant d’en arriver a la question du "virtuel et de l’internet comme net démocratie.

Le caractère introductif est intéressant. Outre les conditionnels et autres précautions oratoires, on par du joueur pathologique, c’est a dire le gambler, celui qui espère toujours que le sort lui sera finalement favorable et qu’il va se refaire, au gamer, c’est au dire au joueur qui joue pour le plaisir de jouer. Que le jeu lui apporte des gratifications en terme de narcissisme, de fantasmes de toute puissance, de maitrise, cela est évident. Mais c’est tous les jeux peuvent remplir ces fonctions.

Le gamer n’est pas un gambler

Après ce premier glissement, on en arrive vite a des recommandations (Smeaton & griffiths, 2004) qu’il faudrait apposer sur les sites de jeu sur Internet.Il s’agit principalement de mettre des avertissements sur le fait qu’il est important de garder le controle sur le jeu et d’empêcher l’éditeur du site à encourager les joueurs a réinvestir les gains ou encore donner la possibilité au joueur de s’exclure lui même du site. Ce sont là des mesures de bon sens, même si l’on peut se demander si elles seront efficaces dans le cas de joueurs pathologiques. Mais il s’agit là de jeux d’argents et de hasard, pas de jeux vidéos. Les joueurs sont des gamers pas des gamblers (parieurs). Une des dynamique du jeu d’argent est que le joueur pathologique est souvent dans l’attente inconciente d’une punition (la ruine financière) en réponse à une culpabilité tout aussi inconsciente (Freud, 1928). Le hasard est alors investi comme une figure parentale pouvant rétribuer ou punir. Cette dynamique n’existe pas dans le cas des gamers. Ici, c’est plutôt la connaissance et la maîtrise de l’ environnement qui compte. Le skill des joueurs de FPS ou de RTS est bel est bien une façon de réduire au maximun tout hasard. Quand au matériel amassé par les joueurs de MMO, il doit également peu au hasard puisque la pratique du farming permet finalement de récupérer les objets désirés.

 

On cherche encore des critères d’addiction.

Alors, a quoi attacher l’addiction aux jeux vidéos ? A la stimulation, répondent les auteurs du rapport et particulièrement  à la stimulation des MMO. Il y a là un virage parce que il y a quelques années l’un des auteurs du rapport mettait plutôt en avant les FPS comme "addictogènes" justement parce qu’ils procurent des sensations. Les facteurs addictogènes des MMO seraient les suivants

on avance des facteurs liés au produit lui même, à sa disponibilité, au fait qu’il soit programmé pour inciter à un temps de jeu important (non sauvegarde des points sinon) ainsi que des facteurs liés au sujet du coté des possibilités d’ identification au héros qui peuvent s’avérer aussi bien facteur de renarcissisation que piège du coté d’idéaux déconnecté de toute réalité, en cas que quête identitaire abyssale"

Ces facteurs posent plusieurs problèmes. D’abord le fait que le jeu vidéo soit addictif en soi alors que la question est justement de monter quels sont les éléments qui pourraient en faire une drogue. Ensuite parce la source du désir de joueur n’est jamais dans le jeu mais dans le joueur. L’observation d’un jardin public montre que les enfants adorent la balançoire ou le toboggan et que le départ suscite chez certain des pleurs et autres manifestations de mécontement. Dira t on qu’ils sont dépendants aux jeux du jardin public ? Autre point problématique : l’identification au héros qui fait de la drogue MMO un objet positif. Dans un cas, cette identification est une dynamique positive car elle aide a la renarcissisation du joeur. Dans l’autre, elle n’a rien a voir avec le jeu vidéo car quiconque est dans une "quête identitaire abyssale" s’accrochera à n’importe quel objet. Enfin, on aura bien évidement remarqué que les points d’expérience d’un MMO sont sauvegardés quelque soit le moment de la déconnection.

 

Dynamiques internes

Après un long pont sur  considérations sur la démographie des joueurs de jeu vidéo (on est heureux que les auteurs aient croisé le Daedelus Project de Nick Yee), la violence et les jeux vidéos, et le virtuel, on retrouve enfin ce qui est l’objet du chapitre : l’addiction aux jeux vidéos. Elle n’est toujours pas prouvée ais le mal est fait. Les conditionnels, les précautions verbales laissent tout de même passer cette idée que le jeu vidéo est une drogue même si la conclusion est tout a fait claire :

il est à priori difficile d’imaginer que la pratique même intensive des jeux vidéos puisse être à l’origine d’une addiction. Le problème spécifique des jeux sur Internet et plus particulièrement des jeux vidéos

Ce qui est donc à examiner, ce n’est donc pas le jeu vidéo, qui est ici contingent. Ce qui est à examiner, c’est la dynamique psychologique du joueur qui le conduit a avoir une pratique que l’on peut juger de l’extérieur ecessive mais qui sert toujours différentes fonctions. Ce la pêut être une manière de s’enfermer, de s’isoler, de ne plus percevoir des aspects de la réalité externe ou interne : ne pas voir le naufrage de son mariage, la situation douloureuse que suscité le chomage, les angoisses sur l’avenir ou encore les sentiments de dévaloration, de souffrance que l’on éprouve secrètement, l’incapacité dans laquelle on se trouve de rencontrer l’autre ou de réaliser des projets que l’on tient par ailleurs pour important. Par ailleurs, cet "enfermement" peut être aussi une façon de maturer ces questions. Dans le psychisme, rien ne se règle rapidement, et même les éclairs de génie ont été précédés de longues périodes de maturation. De la même manière, ce qui de l’extérieur peut être vécu comme perte de temps, est souvent aussi un temps occupé à penser autre chose. Pour le dire autrement, alors que l’on croit que le joueur est "accro" à un jeu vidéo, il est pris par l’exploration de ses caves et ses greniers psychiques.