J’étais hier à Saint Loubes pour une conférence sur les jeux vidéos. La ville de Saint Loubes organise chaque année un Festival du Jeu et c’est dans la suite de cette manifestation que j’ai été invité à parler des jeux vidéos. "La vie en ligne : des jeux, des jeunes et des écrans" était le thème général qui m’avait été donné.
J’aime ces interventions, parce qu’elle m’amènent à reformuler autrement mes hypothèses et mes connaissances. Parfois il faut que je fasse passer des connaissances psychologiques à des gamers, parfois il faut que je fasse passer des connaissances de la culture des jeux vidéos ou de l’internet à des psy ou des parents, et parfois il faut que je fasse les deux à la fois.
Je les aime aussi pour les discussions qui suivent l’intervention. J’avais en tête hier le billet qui est publié aujourd’hui : Penser autrement le jeu vidéo. Le penser autrement que comme un objet-drogue. Le penser tout court, même.
Dans les familles, les jeux vidéos deviennent le principal motif de conflit. C’est en cela qu’ils sont précieux, comme ont été précieux pour les générations précédentes les factures de téléphone, le rock and roll, les vêtements… Ils sont précieux parce qu’il permettent aux parents de repenser à l’éducation qu’ils donnent à leurs enfants : cette éducation est elle conforme à leur idéal ? Cet idéal est il celui qui va aider le mieux l’enfant à grandir ? Les règles de vie qui sont données sont elles des appuis solides, ou sont elles mutilantes pour l’enfant ? Ces règles valent-elles pour tous ou sont elles données pour faciliter la vie de quelques uns ?
Quand les choses vont relativement bien, il est possible de faire de ces zones de conflit des espaces de parole et donc des occasions de croissance pour l’enfant comme pour ses parents. Il faut pour cela que l’enfant soit considéré comme un sujet, et non pas comme un individu à canaliser, maîtriser, ordonner. En un mot : a dresser. Il faut donc supporter que les enfants ne soient pas capables de gérer leurs temps de jeu, qu’ils réclament encore et toujours des occasion de plaisir, et ne pas trop leur faire payer par des contre-attitudes agressives masquées derrières des positions "éducatives".Il faut aussi différencier la situation de l’enfant de celle de l’adolescent. La tache à laquelle s’adonne passionnément l’ adolescent est de faire vieillir ses parents. A cela, il n’est pas de remède. La situation doit être acceptée telle quelle. Dans ces moments, pour le parent, se souvenir de l’adolescent(e) que l’on a été peut être une aide.
Il est important que les parents s’intéressent aux jeux vidéos. Pas parce que ce sont des jeux vidéos. Parce que les enfants ont besoin que leurs parents s’intéressent à ce qu’il font. Il n’y a pas besoin d’être expert en la matière : est on expert lorsque l’on parle avec son enfant d’équitation, de musique, de natation ou de foot ? De la même manière, sans être expert, il est possible et souhaitable de parler avec son enfants des jeux auxquels il joue, de pourquoi il les aime, des types de jeu qu’il préfère ou de la façon dont il joue.
Lorsque les choses vont mal, la situation est tout autre. Les choses vont mal lorsque de façon répétitive et prolongée un enfant utilise le jeu vidéo pour se couper des autres. Elles vont mal lorsque ce n’est plus le plaisir du jeu qui est recherché mais l’appaisement. Dans ces cas, si la famille ne trouve pas en elle les ressources pour sortir de cette situation difficile, une consultation auprès d’un psychologue est indiquée.