Des soldats attendent l’ordre de l’assaut et vident leurs chargeurs en tirant sur leurs compagnons d’armes. Des chamans brulent leur précieuse mana avant le départ dans un champ de bataille. Des héros changent nerveusement de monture tant la tension est grande.. Les jeux vidéo peuvent être des moments de stress extraordinaire. Mais que se passe-t-il dans le cerveau d’un gamer ?

 

Le cerveau reptilien est appelé cerveau primaire, primitif ou archaïque. Le cerveau reptilien est le cerveau des instincts de base, dont l’instinct de conservation. Il est à l’origine des comportements qui répondent à des besoins fondamentaux et assure la sauvegarde de l’individu et de l’espèce. Il fait peu de choses, mais le les fait à merveille sans s’embarrasser de subtilités. Certains animaux, comme les reptiles ou les vertébrés inférieurs, ne possèdent que ce cerveau. Les comportements régis par le cerveau reptilien sont fixés par l’hérédité. Les mêmes comportements répondent systématiquement aux mêmes stimuli. C’est à ce cerveau que l’on doit la mise en œuvre des comportements en cas de stress intense ou de danger vital.

Confronté à des dangers mettant en cause son intégrité physique ou sa vie, l’individu a le choix entre trois types de réponses : la fuite, l’attaque, ou l’immobilisation. Cependant, quel que soit le type de réponse donnée, c’est toujours le cerveau reptilien qui est aux commandes.

La tâche du cerveau reptilien est de donner à l’individu les moyens d’une réponse extrêmement rapide. Face à une situation aussi extraordinaire que le danger de mort, les réponses habituelles sont insuffisantes. Il faut donc des moyens extraordinaires. Le cerveau reptilien obtient ces moyens en mettant de côté tout ce qui n’est pas immédiatement nécessaire, et en donnant des moyens supplémentaires aux organes concernés.

Mais comment le cerveau reptilien arrive à cette mobilisation ? Le point de départ est situé dans le tronc cérébral, dans une structure appelée l’hypothamus. L’hypothalamus est le chef d’orchestre du cerveau primitif. Il est en charge de la température du corps, de sensation de faim, de soif, de fatigue, et du contrôle du rythme circadien. Il tire donc toutes les ficelles qui nous conduisent à être actif ou inactif.

L’hypothalamus envoie un signal nerveux dans deux capsules qui sont situées au sommet des reins. Ils sont liés par une partie du système nerveux végétatif appelle système sympathique. Le signal nerveux parcourt la chaine ganglionnaire à la vitesse de 180 Km/h. Il lui faut donc 1/100e de secondes pour arrive à destination, soit un temps plus rapide qu’un clignement d’œil. Les glandes surrénales produisent en continu de l’adrénaline pour ce genre d’occasion. Lorsqu’elles reçoivent le signal de l’hypothalamus, les glandes médullo surenales libèrent de l’adrénaline dans le sang. En un battement de cœur, l’hormone est distribuée dans tout le corps. Lorsqu’elle atteint le foie, elle déclenche une réaction chimique qui transforme le glycogène en glucose. Le corps dispose alors du carburant supplémentaire pour passer de l’état d’alerte extrême à l’action. D’autres mécanismes préparent l’organisme à l’action. La pupille se dilate et capte le moindre photon. Le cerveau fonctionne à plein régime, du fait de l’afflux d’oxygène et de glucose, donnant à la personne une sensation d’hyperperception. Tout devient clair, et les choix sont évidents. La vasoconstriction sur les organes profonds ralenti le système digestif. Seuls les organes directement impliqués dans l’action sont irrigués. L’accès à l’énergie est la clé. L’augmentation du rythme cardiaque, qui peut aller jusqu’à 200 pulsations par minutes, et de la ventilation pulmonaire assure aux muscles l’oxygénation et et le carburant supplémentaires. Mais même des ressources supplémentaires en sucre et en oxygène ne sont pas suffisants ici. Le corps a besoin d’un super-carburant et ce super-carburant s’appelle d’adénosine triphosphate. Lorsqu’il s’agit de vie ou de mort, c’est de cette molécule d’énergie dont le corps a besoin. Avec l’ATP, le corps met le turbo. Pendant quelques précieuses secondes, l’organisme fonctionne au-delà de ses limites habituelles. Après le rush d’adrénaline, le corps retourne peu à peu à l’équilibre. L’hormone est rapidement éliminée : toutes les deux minutes, la quantité d’adrénaline contenue dans le corps diminue de moitié. Le système nerveux parasynthétique commence à mettre en œuvre les opérations de restauration d’un organisme durement éprouvé.

Comment ce cerveau reptilien est- il activité dans les jeux vidéo ? Faut-il craindre, comme le dit Grossman, que la pratique assidue des jeux vidéo violents, surtout chez les plus jeunes, donne de plus en plus la main au cerveau reptilien ?

En fait, on en sait rien. Une seule étude a mesuré le taux d’adrénaline chez les joueurs (Lynch, 1999) et a montré une augmentation de l’adrenaline et la noradréaline chez des adolescents agressifs jouant à des jeux vidéo violents

Dans les jeux vidéo, l’activation du cerveau reptilien se devine au travers des réactions au stress que l’on peut percevoir. Même si le rythme cardiaque n’atteint pas des valeurs extraordinaires, il peut augmenter suffisament pour devenir perceptible. La transpiration, l’augmentation rythme respiratoire sont d’autres signes. Ces modifications physiologiques ont pu but de permettre la meilleure réponse. Mais le cerveau reptilien peut également être à l’origine d’une conduite d’immobilisation : le joueur est alors soudainement incapable de prendre la moindre décision et laisse le destin décider de son sort.

L’impact neurophysiologique de la violence sur les enfants a été étudié, mais celui des images violentes et plus particulièrement des jeux vidéo violents est encore un domaine quasiment inconnu. Lynch (1999) a montré que des adolescents violents produisaient plus d’adrénaline que les autres joueurs lorsqu’ils jouaient à des jeux vidéo violents. Mais cette production est elle le fait du jeu vidéo ou d’un organisme déjà entrainé et prêt à la violence ?

Le stress procuré par les jeux vidéo, qu’ils comprennent des images violentes ou pas, reste faible à modéré. C’est cette modération qui fait que le jeu reste possible. Aucun jeu vidéo ne pousse l’organisme à ses limites. Aucun jeu n’oblige l’organise à puiser dans ses réserves parce que aucun jeu vidéo n’est une situation vitale. Le problème est donc moins celui de l’activation du cerveau archaïque que du devenir des sensations vécues pendant le jeu vidéo