Dans le débat sur l’addiction aux jeux vidéo, l’identification correcte des joueurs problématiques est un point très important. Plusieurs auteurs ont en effet mis en évidence que les critères diagnostiques proposés ne permettent pas de faire la différence entre les joueurs qui présentent une pathologie et les autres. Il est donc urgent de repérer les joueurs problématiques avant même de pouvoir parler d’addiction aux jeux vidéo.

C’est à cette difficile et nécessaire question que s’attaquent Billieux et ses collègues. L’enjeu est de distinguer les joueurs émotionnellement vulnérables qui jouent pour échapper à une émotion négative des joueurs impulsifs antisociaux pour qui le jeu vidéo est la conséquence d’impulsions et de mauvais prises de décision. Il s’agit donc de différencier les joueurs qui utilisent les jeux comme mécanisme de coping de ceux pour qui le jeu vidéo est une addiction comportementale

L’étude porte sur 1601 joueurs français de World of Warcraft qui ont répondu à des questionnaires permettant d’évaluer leurs motivations, leur impulsivité, leur estime de soi, leur tendance à vivre des affects positifs et négatifs et leur addiction à l’Internet

Billieux et ses collègues identifient 3 types de joueurs problématiques et deux types de joueurs non-problématiques. Les joueurs non-problématiques représentent 46% de l’échantillon. Les joueurs problématiques sont composés de joueurs dont le faible contrôle des impulsions les amène à fuir la réalité( “unregulated escapers”) ou à se précipiter dans la performance (“unregulated achievers”). Les hard core gamers cumulent les deux difficulté avec en plus un goût pour le jeu de rôle. Parmi les joueurs non-problématiques, les auteurs distinguent les joueurs dont le comportement régulé les pousse vers la récréation (“regulated recreational gamer”) ou les interactions sociales (“regulated social role players“).

Les auteurs concluent 2) que l’évaluation des facteurs psychologiques qui conduisent à l’utilisation problématique des jeux vidéo est plus importante qu’un diagnostic ou une liste de symptômes 2) la diversité des profils met en lumière la nécessité de mettre en place des prises en charge qui traitent sélectivement les mécanismes concernés. Pour les joueurs du cluster 1 bénéficieront d’une intervention qui les aide a avoir un meilleur contrôle de soi tandis qu’avec les joueurs du cluster 3, l’invention visera à traiter le problème sous-jacent.

Plusieurs remarques :

  • L’étude identifie des sous-types de joueurs
  • La conclusion selon laquelle les joueurs non-problématiques satisfont leurs besoins psychologiques de base ailleurs que dans World of Warcraft n’est pas étayée
  • Il n’est pas prouvé que satisfaire ses besoins psychologiques de base dans un jeu vidéo soit un problème
  • L’importance de la prévalence des joueurs problématique n’est pas discutée
  • Il est problématique de mettre tous les hardcore gamers dans le groupe de joueurs problématiques
  • Il serait étonnant que tous les hardcore gamers aient des traits d’une personnalité obsessive-compulsive
  • Le lien entre des profils problématiques et des dysfonctionnement qui affectent de manière importante des secteurs majeurs de la vie des personnes n’est pas fait
  • Les auteurs affirment une chose et son contraire : le comportement des joueurs Rêveurs non régulés (cluster 3) est conceptualisé à la fois comme un coping inadapté et comme une addiction
  • L’étude ne permet pas de valider l’addiction aux jeux vidéo.
  • L’étude participe de la pathologisation des comportements que les auteurs critiquent