Vingt années de recherche n’ont pas permis de construire des outils d’évaluation corrects de l’addiction à/aux (mettre ici quelque chose de numérique).

Depuis l’invention de l’addiction aux média numériques plusieurs échelles de mesure ont été proposés. Ces échelles reposent essentiellement sur un copier-coller avec le trouble de l’addiction aux substances ou sur le modèle composite proposé par Griffiths (2005) organisé autour de la salience, la modification de l’humeur, la tolérance, le syndrome de manque, le conflit avec d’autres activités, la perte de contrôle, les rechutes et le sentiment de culpabilité.

Adrian Abendroth et ses collègues ont passé en revue une cinquantaine d’échelles de mesure d’addiction aux média numériques. Les échelles de l’addiction à l’Internet, au smartphone, aux réseaux sociaux, et aux jeux vidéo ont été analysées. Les auteurs constatent que l’utilisation compulsive et les conséquences négatives (du temps passé à utiliser le média) forment 50 % de la plupart des échelles. En ce qui concerne les jeux vidéo spécifiquement, Les composants comme l’évasion, la régulation de l’humeur et le confort social sont beaucoup présents sur les différentes échelles. 

Cette recherche met en lumière les aspects problématiques de l’addiction aux média numériques en général et aux jeux vidéo en particulier. Tout d’abord, l’accent mis sur la compulsion pose la question de la différence entre la compulsion et l’addiction. Si l’addiction comporte un élément compulsif, toutes les compulsions ne sont pas des addictions. La passion, harmonieuse ou non, pour quelque chose, est souvent vécue et décrite comme une compulsion. Il serait donc plus heureux de parler d’utilisation compulsive d’un média plutôt que d’addiction. Ensuite, il est souvent difficile de différencier les différentes formes d’addictions. Par exemple, une personne qui joue à Call of Duty Mobile doit elle être évaluée pour une addiction à l’Internet, au smartphone ou aux jeux vidéo ?

Il est tout de même étonnant que 20 années de recherche n’ont pas apporté de réponses claires à des questions pourtant essentielles. De nombreuses échelles mesurant différentes addictions numériquesont été construites, mais on ne sait pas quelle addiction elles mesurent, ni même si elles mesurent une addiction. Que conclure ? Ou les chercheurs sont incompétents (ce que je ne crois pas) où ils cherchent à construire quelque chose qui n’existe pas (ce que je crois) ou ils cherchent autre chose comme de la visibilité académique (ce que je crois aussi)..

Abendroth, A., Parry, D. A., Roux, D. B. L., & Gundlach, J. (2020, April). An analysis of problematic media use and technology use addiction scales–what are they actually assessing?. In Conference on e-Business, e-Services and e-Society (pp. 211-222). Springer, Cham.