Loïc Lemeur vient de poster un intéressant billet à propos de Twitter. Dans la grande tradition des listes de la blogosphère il donne les 10 raisons pour lesquelles il suit 10.000 personnes sur twitter.  Loïc Lemeur, comme Robert Scobble ou Jason Calacanis est un “Über user” de l’Internet. A ce titre il est soumis exigences de travail importantes ce qui permet plus facilement de mettre en évidence de mécanismes qui existent chez tout le monde. Alors que l’on s’attendrait a ce qu’il soit submergé par ses 10.000 followers, il rend compte des aspects positifs du syndrome de Nessus

Le point 3 me semble particulièrement important

3- I love watching the updates of 10 000 people that have related to me in anyway, when I have “free” time, it’s just watching, being curious about them and I love to discover new people this way.Loïc Lemeur

Effectivement, regarder le torrent des twitts est quelque chose de fascinant. Chacun peut s’en rendre compte avec Twitter Elections ou avec Twittervision. Ce n’est pas Twitter qui est en cause : nous avons la même fascination avec les outils du Digg Labs. Le plaisir éprouvé ici est celui de voir des choses se transformer en ayant la possibilité d’intervenir ou pas. Il est le même que celui que l’on éprouve en contemplant le vent dans un champ de blé ou le ressac des vagues. Le plaisir vient de ce que nous regardons nous permet de nous figurer des événements internes, plus ou moins conscients, plus ou moins psychiques : torrents de sang qui se précipitent dans la pompe cardiaque, transit intestinal, rapides activations et désactivations des chaînes neuronales, modifications des investissements conscients et inconscients en sont quelques exemples.

Il est une autre source de plaisir, qui tient à la position imaginaire du passionné. Le modèle est ici celui de la relation amoureuse :

4- I would like to learn more about them, in these 10 000 people I bet there are many I would love to have dinner with because we have many interests in common and I probably don’t know about them Loïc Lemeur (c’est moi qui souligne)

Pour pouvoir déjeuner avec tant de personnes il faut sans doute un apétit… d’ogre.

Cette passion pour chaque follower, le désir d’en savoir plus sur chacun d’eux, individuellement, et d’avoir avec chacun d’entre eux une relation privilégiée ramène a une autre position imaginaire. Nous avons en effet tous vécu une telle passion. C’est celle qu’éprouve une mère pour son enfant, et réciproquement, la passion de chaque enfant pour sa mère pour sa mère, explorant son visage a la recherche des émotions internes qui l’animent. Pour chaque enfant, une mère est d’abord perçue comme ayant un regard pouvant porter profondément en lui. Ce qu’il pense, croit-il, est directement perceptible par sa mère *. Aussi, son statut de bonne mère n’est jamais a jamais acquis : une telle puissance pourrait bien retourner ses pouvoirs, explorer sa psyché, détruire son contenu ou piller ce qu’elle a de plus précieux. Pourquoi n’aurait elle pas de tels désirs puisqu’il peut les reconnaître chez lui ? Les mondes numériques, parce qu’ils nous donnent le sentiment d’entrer directement les uns avec les autres, nous expose a ce fantasme, d’ou les précautions :

“it is not spam… It is not intrusive. Loïc Lemeur

 

Ainsi, nous sommes tous comme Loïc Lemeur. Tantôt nous sommes comme des enfants qui regardent le tohu-bohu des mondes numériques. Cela peut être les variations des vitesses de chargement sur un logiciel P2P, le chargement des mails ou l’arrivée des twittts. Plongés dans le spectacle des changements infinis** que nous offrent les mondes numériques, et nous y trouvons des visualisations pour adosser les changements que nous sentons en nous; tantôt nous sommes comme des mères, plongeant notre regard dans notre petit monde d’enfants, avec plus ou moins de bienveillance.

 

 

 

* La découverte qu’il peut mentir et que le parent n’est sache rien est toujours un événement marquant une évolution favorable dans le développement de l’enfant.

** La transformabilité infinie est une des caractéristiques de ce que René Roussillon appelle le médium malléable.