L’article Psychanalyse du web social avait tout pour attirer même si l’on se doutait que le titre était un peu sur-dimensionné pour un billet de blogue. Le lien social, les psychanalystes en suivent les fils et les effilochures depuis Freud. Toute une partie de la théorie psychanalytique lui est consacré et Freud lui-même en a tracé les grandes voies en explorant les processus d’identification, de la transmission, de la formation de la conscience morale. Après Freud, des psychanalystes ont exploré la vie inconsciente des groupes. Les travaux de Bion, en Angleterre, et de Didier Anzieu, enFrance, ont été le boutefeu d’une théorie et d’une pratique psychanalytique des groupes. A partir de là, l’abord psychanalytiques des liens qui existent dans ces groupes particuliers que sont les couples et les familles a été possible.

La psychanalyse du lien social occupe dans le temps quelques décennies de travail. Sur une bibliothèque, cela fait quelques mètres de livres. Même si l’on s’en tient à la très succincte bibliographique que Amazon.fr sait de René Kaës, on optient 41 titres. La bibliographie de chaque titre renferme une centaine de référence, et même si d’un livre à l’autre il est des références communes, cela donne une idée de l’importance du champ que peut couvrir une Psychanalyse du web social

 

Le ring Twitter ?

Que Twitter puisse être un ring ne correspond pas à ce que je peux observer. Il peut bien évidement avoir quelques échanges un peu plus vifs que d’autres, mais rien qui ne peut atteindre l’intensité des flames wars que l’on a pu observer sur Usenet ou sur les forums web. La raison principale en est que Twitter est un espace de l’immédiateté alors que les flames wars ont besoin de temps pour se développer. L’archive est leur meilleur carburant. La rapidité avec laquelle le contenu est rafraîchi sur Twitter ne permet pas que de telles oppositions se mettent en place. La seconde raison est que Twitter est un espace dans lequel on s’adresse généralement à tous ou à un. Il est difficile de former des cultures de groupes qui vont s’affronter avec une division entre des pro et des anti. Enfin, Twitter est un espace ego centré : chacun s’occupe de son réseau et la compétition pour le leadership peine a se développer du fait du dispositif. D’une certaine manière, le monde de Twitter est aussi simple que celui du Roi du Petit Prince : tous les autres sont des sujets

 

Contrairement à ce que l’on peut lire sur Twitter superstar du clash, Twitter ne ruine pas une carrière en cinq secondes. L’entraineur de foot donné en exemple a été renvoyé pour des raisons autres que Twitter qui ne sert ici que d’excuse. les “clashs” donnés en exemple seraient oubliés s’il n’avaient pas été réunis dans ces deux billets. Ce qui est intéressant, c’est que Nick Carraway et Vincent jouent un rôle de porte-mémoire. Dans l’environnement Twitter, le rafraichissement permanent du flux fait que l’on a tendance à être dans une sorte de présent suspendu. Nous avons donc besoin de points de fixation de la mémoire de la communauté. C’est ce que font quelques billets de blogues en sélectionnant des moments de Twitter et en les présentant comme dignes d’attention. Curieusement, le blogue qui était considéré comme un lieu de publication rapide – avec ce que cela signifie comme suspicion de choses rapidement pensées – devient le lieu d’élaboration d’un autre dispositif qui est encore plus rapide.

 

Le surmoi, la cathérdrale et le bazar

Les premier observateurs du de l’internet ont mis sur le compte d’une désinhibition les débordements qu’ils pouvaient observer. Cette déshininbion concerne aussi bien les mouvements agressifs que narcissiques ou érotiques. Cet effet de désinhibition en ligne a été décrit par John Suler dès 2002. Suler donne comme comme causes de cette désinhibition l’anonymat, l’invisibilité, la communication asynchrone, la virtualité, et l’égalitarisme. Cet effet n’est pas du à uniquement quelconque absence de surmoi – et certainement pas cette fiction de “surmoi numérique”. Enfin, les débordements que l’on peut observer en ligne peuvent être le fait du surmoi : on peut sadiser l’autre pour les meilleures raisons du monde.

On a trop souvent mis l’accent sur l’effet de déshinbition en ligne sans préciser qu’il est dû à la rencontre d’un dispositif et d’un psychisme. En effet, l& désinhibition n’est pas le fait de tous, et elle n’est pas permanente chez ceux qui s’y laissent aller, sinon nous n’aurions pas pu construire nos cathédrales et nos bazars. En ligne comme hors ligne, la vie sociale est faite de roles et de status, de pacte, de processus de transformations, de mises en commun comme de réserves. Ce que nous faisons en ligne tient tout autant des processus d’auto-organisation qui font de nous des fourmis numériques. C’est une autre façon de dire que nous devons abandonner, pour faire lien social, une part de notre subjectivité. Le règne de nos petites planètes Moi n’est plus absolu : nous devons accepter des empiètements, des annexions, des parts communes et partagées avec d’autres.

Ces parts communes et partagées correspondent aux processus d’identitification – le “qui se ressemble s’assemble – qui est un des grands artisans du lien social. Sur Internet, ce processus se donne a voir avec les dispositifs qui affichent les billets liés ou encore avec les nuages de mots qui renvoient à d’autres articles. Au niveau des individus, les propositions de Facebook fonctionnent sur ce même principe.

Ainsi, nous pouvons dire une nouvelle fois avec Olivier Ertzsheid, que l’homme est un document comme les autres [Slideshare] [PDF]