Patch Rectificatif : Fixed 4chan ignorance issues publié par Pierre Alexandre Rouillon sur RRW-fr contribuera sans doute à faire connaitre 4chan du grand public – oui, pour 4chan, RRW c’est le grand public. En quelques mots, 4chan c’est d’abord un dispositif d’écriture qui permet de poster anonymement. Autour et avec cette possibilité, se sont agrégés  des communautés dont la plus turbulente est regroupée dans la hiérarchie /b

 

/b/est violent.

L’invective, la violence, et la haine y sont endémiques. La guerre civile y est presque permanente. L’anonymat encourage sans aucun cette violence. Mais c’est aussi une violence encadrée :elle est généralement maintenue dans un lieu de la culture undeground. Ainsi, certaines vidéo pourraient avoir une audience beaucoup plus grandes si elles étaient postées ailleurs que sur /b/ . A cet encadrement dans un lieu, il faut ajouter un encadrement dans des pratiques : on n’est pas violent n’importe comment.

 

/b/ est une culture paranoïaque : l’autre y est toujours menaçant, alors même qu’il que les différences sont gommées au maximum. /b/ peut être lu comme une réaction à l’hyper- individualisme de nos sociétés. ici, ce qui compte, ce qui est valorisé, c’est la masse, l’ensemble, et cela passe par la destruction des marqueurs identitaires. Tous pareils, tous identiques, et jusque dans l’expression : les meme sont aussi une façon de gommer la parole individuée. L’image s’impose dans sa fonction de rassemblement et . C’est un raccourci extraordinaire pour la pensée mais cette puissance  peut tout aussi bien être au service des processus de pensée et de symbolisation, ou servir à les entraver.

 

/b/ a besoin des autres

"l’objet nait dans la haine” et les /bers ont tout de même besoin de s’appuyer sur ce qu’ils ne sont pas :  « 4chan pour les nuls blogueurs français » annonce malicieusement Pierre Alexandre Rouillon. Il faut entendre ici malice dans toute sa résonance : c’est a la fois la malice infantile, celle qui mêle des éléments disparates et qui dit dans un trait quelque chose que l’adulte a parfois du mal à énoncer. Mais c’est aussi quelque chose qui a trait au malin que ce soit dans le sens de diabolique – on retrouve ici les résonnances sexuelles infantiles – ou de cancer

 

/b/ jargonne.

Toute communauté a son vocabulaire, ses tours de pensée et de langage. /b en a fait un art. Non seulement les /bers utilisent un jargon très technique qui métaphorise leurs activités quotidiennes, mais ils sont très friands de l’utilisation de l’image. Les discussions font penser à la façon dont les rêves fonctionnent :  la régression formelle permet de travailler les discours selon les procédés habituels du rêve : condensation, déplacement, figuration

/b/ est une culture de l’image.

Les discussions sur /b/ se font principalement à coup d’image. Cela tient à plusieurs facteurs. D’abord il y a le fait que nous disposons maintenant d’outils permettant de créer et de manipuler les images avec une grande facilité. Ensuite, l’image est quelque chose qui s’est imposé tout au long du 20ième siècle. Elle nous sert à communiquer, à interagir et à comprendre le monde dans lequel nous vivons.

180px-xenunigra Une image comme celle ci ulitisée lors de “Anonymous vs Scientology” superpose à la fois l’ennemi à abattre – la “scientogogys” – et un noir et laisse flottante la question de savoir s’il s’agit d’une image raciste – le noir comme étranger à expulser – ou non.

/b/ évolue

Même dans un endroit comme /b le temps commence a faire son œuvre. Il différencie des “anciens” et des nouveaux. Les premiers sont nostalgiques de leur jeunesse et voient dans les nouveaux venus non pas une force de renouvellement mais des “newfag”, un “cancer qui tue /b

Cette idée de cancer est récurrente : on l’avait trouvée aussi à propos de Boxxy : elle signe le fait que l’agressivité de la communauté ne trouve pas de voies de symbolisation suffisantes et fait retour dansla communauté. La représentation d’un “cancer”, c’est à dire d’une prolifération désordonnée de cellules, montre également que le chaos de /b n’est qu’apparent. Il est régit par un ordre que l’arrivée des nouveaux conteste.

 

/b/ c’est anonymous

Anonymous est tout à la fois une plaisanterie, une communauté, une force de frappe, une nuisance, une utopie, une idéologie, une foule au service de vengeances personnelles, la mise en commun et en forme de toutes les malveillances… Anonymous peut s’attaquer a la Scientologie ou à des personnes sans même que ces attaques ne soit portées par un projet. Anonymous n’est commandé par rien ni personne et ses actions n’ont pas un sens qui est forcéement lisible.

L’ensemble fonctionne comme les criquets pèlerins du sahel. Des individus isolés se regroupent, et lorsque l’ensemble atteint une taille critique, des actions sont possibles. Il est probable que ce soit la mise en résonnage ‘d’un fantasme individuel qui serve de carburant aux actions d’anonymous. Anonymous est une forme de sociabilité dans laquelle les fantasmes de toute puissance et d’immortalité peuvent être réalisés.

 

 

Un des intérêts de 4chan, /b/ et de Anonymous, c’est qu’on y voit des procédés de façon plus visibles qu’ailleurs. 4chan est un des cœurs battant du web. C’est une zone originaire du fonctionnement du web dans lequel ont trouve les processus premiers : violence, tyrannie, terreur, mais aussi création. Du chaos des actions individuelles, de leur  appareillage dans une sociabilité faisant naissent à la fois des éléments qui peuvent avoir valeur persécutive ou mytho-poétique.